Dans un billet mis en ligne sur son blog mardi 20 août, le député socialiste de l'Essonne Thierry Mandon, porte-parole du groupe PS à l'Assemblée, suggère de revenir partiellement la fin de l'exonération fiscale des heures supplémentaires, mesure phare de l'ère Sarkozy abrogée par le gouvernement à son arrivée au pouvoir, à l'été 2012. Il propose de créer une mesure de franchise des heures supplémentaires exceptionnelles et faiblement rémunérées qui permettrait aux salariés les plus modestes d'être exonérés d'impôt sur le revenu.

Cette initiative a reçu le soutien de Laurent Grandguillaume, député PS de la Côte-d'Or et du Député Maire de Drancy Jean-Christophe Lagarde (voir fac-similé ci-après). Les centristes de l'UDI ont renchéri en proposant ce jeudi la défiscalisation des heures supplémentaires pour tous les salariés qui gagnent moins de deux fois le SMIC et pour les PME de moins de 50 salariés. On croyait le débat sur les heures supplémentaires enterré, il ne l'est pas. 

En clair cela veut dire quoi ?

Cette proposition est, selon Mandon, une « réflexion que nous pourrions mener a un seul objectif : soutenir le pouvoir d’achat des salariés aux revenus les plus modestes ». Cela parait louable à première vue, mais des effets pervers pourraient bien en découler. Le porte parole du groupe PS à l'Assemblée Nationale, estime que ce rétro-pédalage sur la place des heures supplémentaires dans l'activité de l'entreprise ne nuira pas pas à l'embauche. Faut voir. Sachant que si l'on s'en tient aux statistiques publiées par le DARES pour l'année 2011, année phare du système Sarkozy, c'était près de 740 millions d'heures supplémentaires qui furent effectuées toute entreprises confondues. 740 millions, c'est combien d'emplois ? 

Certes le député socialiste, ne parle pas de défiscalisation des charges sociales, patronales et salariales, mais il ouvre une brèche dans laquelle le patronat va s'engouffrer. 

Gagner moins pour travailler plus

Le patronat va donc se frotter les mains. En effet, cette mesure, sera le deuxième effet kiss-cool pour les salariés après la claque libérale de l'ANI ( qui n'a ni été signée par FO, ni par la CGT). Prenons le cas d'un salarié entrant dans les critères définis, c'est à dire qui gagne moins de deux fois le SMIC et travaillant dans une PME de moins de 50 salariés, j'imagine la proposition du patron. Il baisse les salaires au plus bas et offre l’heure supplémentaire défiscalisé à son salarié pour augmenter ses revenus. Que se passe-t-il si le salarié refuse ? C'est un refus de flexibilité comme défini dans l'ANI (accord national interprofessionnel)  ? Si c'est le cas c'est un licenciement en vue.

De plus ce risque de voir des salaires tirés vers le bas au profit des heures supplémentaires est un handicap pour le salarié. Tout le monde sait que pour une demande de prêt pour l'achat d'une résidence principale est accordé sur la base du revenu net hors heures supplémentaires. Donc problème pour l'obtention de prêts. Autre souci, le calcul du montant des retraites. En effet le calcul est basé sur le revenu indiqué au contrat de travail et ne tient ni compte des heures supplémentaires, ni d'éventuelles primes.

Double peine pour le salarié smicard !

Et le pouvoir d'achat dans tout cela ?

Le salarié concerné par la mesure Mandon ne consommera certainement pas plus. Les frais de fonctionnement du quotidien comme le coût de l'énergie (électricité, gaz) en perpétuelle augmentation et non maîtrisée par l’État, le carburant pour aller travailler devenant un luxe, la réduction des prises en charge des frais médicaux et la tendance à glisser vers un système mutualiste privé, vont vite absorber le gain des heures supplémentaires. Le salarié n'aura pas plus d'argent pour consommer comme on l'entend. Le pouvoir d'achat n'augmentera pas ; au contraire. Et ce n'est pas au plus démuni d'être le levier de la croissance !

Quelques (bonnes ?) idées pour ce cher député Mandon

La revalorisation du SMIC, la création d'une super-TVA à 43 % pour les achats de luxe comme les grosses berlines, yachts, haute-couture, joaillerie et horlogerie de luxe, immobilier de prestige, hôtellerie 5 étoiles et palaces, TVA hyper-réduite à 1% pour l'alimentaire, taxation sur le volume des transactions boursières, taxer au plus fort les entreprises qui utilisent le CDD ou l'intérim à outrance, et bien sûr ne pas autoriser les heures supplémentaires et se tenir à la règle des 35 heures (ou 39 heures comme dans la restauration). 

Dans l'attente de ce qu'il va en ressortir, mais le pouvoir d'achat n'est pas la panacée pour favoriser la croissance. Il va être nécessaire de repenser notre modèle économique, le rôle et la place de chacun. La France est en train de devenir une terre de production de services au détriment d'une industrie de pointe qui a fait sa richesse pendant des décennies On laisse filer notre savoir-faire ailleurs sous couvert d'exportations possibles. Alors favorisons et cultivons nos spécificités en développant celles-ci dans un cadre environnemental et respectueux de notre qualité de vie, en imposant les énergies propres, en privilégiant les productions et le commerce de proximité.  

La mauvaise idée du député Mandon, les heures sup'
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