Par Myriam El Khomri, Adjointe au Maire de Paris, Chargée de la prévention et la sécurité, Conseillère déléguée du Maire du 18ème, Chargée de la prévention et de la tranquillité publique.

Le mardi 26 février 2013, vous énonciez sur le plateau des 4 Vérités (France 2) une série d'approximations sur le thème de la sécurité que je me dois de rectifier car la somme d'imprécisions sur ce thème, comme sur bien d'autres, ne fait pas une vérité, encore moins un programme ou même une vision.

Vous citiez en exemple Rudolf Giulani, Maire de New York de 1994 à 2001, qui "a réussi à transformer complètement sa ville du point de vue de la sécurité". Seulement, vous omettez un détail non des moindres: cette transformation n'aurait pas été possible sans le renforcement des effectifs de la police new-yorkaise, avec plus de 10000 nouveaux agents recrutés pour accompagner la réforme de Giulani. Nul besoin de vous rappeler que c'est Nicolas Sarkozy -alors que vous faisiez partie du Gouvernement- qui a fait le choix mal réfléchi de réduire considérablement les effectifs de police, avec notamment la suppression, entre 2010 et 2011, de plus de 400 postes de policiers à Paris, au moment où le Maire de Paris revoyait à la hausse la participation de la Ville au budget de la Préfecture de police de Paris. Ce choix malencontreux: je vous invite à l'assumer auprès des Parisiennes et des Parisiens.

Pour corriger cette ineptie, Manuel Valls a déjà annoncé la création au niveau national de 500 postes supplémentaires de policiers et de gendarmes, chaque année jusqu'en 2017.

Comparaison n'est pas raison non plus, lorsque vous -candidate à la primaire UMP- ignorez les différences fondamentales entre les prérogatives du Maire de Paris et ceux du Maire de New York en matière de sécurité. Ce n'est pas, non plus, en important quelques concepts d'un modèle étranger sans l'adapter à notre contexte national que nous définissons une vraie politique locale de sécurité. Alors de grâce, apprenez de vos erreurs passées et ne récidivez pas! Si la ville de New York a réussi à obtenir des résultats tangibles en matière de sécurité, c'est justement parce qu'elle a trouvé le juste milieu entre les trois piliers fondamentaux que sont la prévention, la dissuasion et la répression, avec notamment un renforcement conséquent des structures sociales, de lutte contre la récidive et de prévention de la délinquance des jeunes mineurs.

C'est sur ces chantiers-là que la municipalité parisienne œuvre, en collaboration étroite avec la Préfecture de police, le Parquet et le Rectorat, signataires du Contrat parisien de sécurité. Avec l'ensemble des partenaires locaux, nous avons fait le choix de la coproduction de la sécurité, fondée entre autres sur le Contrat parisien de sécurité et sa déclinaison par arrondissement.

Par ailleurs, vous réduisez l'insécurité à "une augmentation de 60% des cambriolages à Paris en janvier 2013". Sachez, tout d'abord, qu'une analyse sérieuse en matière de délinquance ne peut être conduite que sur une période de temps significative et donc annuelle. À cette échelle, les chiffres sont parlants: alors que nous avons constaté à Paris une hausse de 2.2% des cambriolages entre 2010 et 2011, nous avons enregistré une baisse de 4.4% en 2012. Je vous précise d'ailleurs que la Ville de Paris contribue activement à cet effort, en abondant le Budget spécial de la Préfecture de police de Paris à hauteur de 308,24 millions euros sur un budget global de 734,39 millions d'euros en 2013 (soit près de 42%), une participation en hausse continue depuis 2001.

Durant toute une décennie, vous nous avez imposé des statistiques prescrites à l'avance et des bidouillages selon divers procédés volontairement imprécis: déqualification de certains délits en contravention (par exemple l'enregistrement des tentatives de cambriolage comme de simples dégradations de porte), reports statistiques sur les mois suivants, maniement et interprétations arbitraires des statistiques, etc.

Je vous invite donc sincèrement à ne pas masquer vos lacunes sur le terrain par des discours musclés, qui rappellent trop votre triste porte-parolat auprès de Nicolas Sarkozy, et à ne pas instrumentaliser davantage la question de la sécurité à des fins partisanes et politiciennes. Les Parisiennes et les Parisiens en sont bien conscients; et ce n'est pas ce qu'ils attendent des femmes et des hommes politiques, surtout lorsqu'ils sont confrontés au quotidien à des problèmes d'insécurité.

Myriam El Khomri

Adjointe au Maire de Paris, chargée de la prévention et la sécurité

Lettre ouverte à NKM
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