Christiane Taubira a accusé mercredi la droite d'avoir fait preuve de laxisme lorsqu'elle était au pouvoir après les révélations sur une erreur juridique commise en 2004 qui a conduit à la libération de détenus avant la fin de leur peine. La ministre de la Justice, récemment critiquée par l'opposition après la libération de trois condamnés faute de places en prison, a promis d'étudier les mesures susceptibles de limiter le nombre de personnes concernées par ce "bug".

Les révélations du Canard enchaîné

Selon Le Canard enchaîné, plusieurs dizaines de détenus pourraient être libérés de prison sur la base d'un arrêt rendu le 26 juin par la Cour de cassation qui a jugé nul et non avenu un décret pris en 2004 par le ministre UMP de la Justice Dominique Perben portant sur la prescription.

Le Code pénal prévoit que les peines prononcées par les juridictions se prescrivent (20 ans pour les crimes, 5 ans pour les délits et 3 ans pour les contraventions). Au-delà de ce délai, elles ne peuvent plus être ramenées à exécution.

"Le gouvernement de 2004 a décidé de définir ces actes (de prescription) par décret alors que cette définition ne pouvait être faite que par la loi", a dit Christiane Taubira à la presse. "Ce décret a duré huit ans durant lesquels les gouvernement successifs ont été en infraction par rapport à la loi."

La ministre de la justice s'est dite "extrêmement préoccupée par ce laxisme de la droite, de gouvernements successifs qui (...) ont pris des risques considérables sur la sécurité des Français, pour la protection des victimes, pour la récidive".

2004-2012: 8 ans de désinvolture 

Pour la Garde des sceaux, "il y a dans cette désinvolture qui a duré plus de huit ans un message d'impunité puisque des personnes qui ont été condamnées seront élargies du seul fait d'erreurs législatives faites par des gouvernements successifs".

Selon le ministère de la Justice, les parquets doivent procéder au total à la vérification de 3.499 condamnations.

A cette heure, 13 cours d'appel ont achevé leurs vérifications, a indiqué Christiane Taubira. Ces vérifications concernent 848 condamnations et six personnes ont déjà fait l'objet d'une libération le 26 et le 30 juillet.

Réexamen des dossiers

La ministre de la Justice s'est engagée à ce que les dossiers soient examinés minutieusement de façon à voir "quelles dispositions contenues dans les procédures pourraient éviter ces libérations".

"Des personnes qui sont concernées n'ont pas été libérées parce que d'autres peines ont pu être mises à exécution et a permis de les maintenir en détention", a-t-elle dit.

La révélation de l'erreur juridique a suscité de vives critiques dans les rangs de la majorité et de l'extrême droite.

Le président socialiste de la commission de lois à l'Assemblée nationale Jean-Jacques Urvoas a fustigé la "bourde juridique et l'incompétence" de Dominique Perben et l'inaction de ses successeurs.

"C'est une erreur qu'un étudiant de première année de droit n'aurait pas dû faire", a-t-il estimé sur BFM TV. "Il reste l'incompétence de tous ces Gardes des sceaux qui se sont succédé pendant des années qui n'ont pas vu la chose".

Le vice-président du Front national, Florian Philippot, a de son côté renvoyé dos à dos le PS et l'UMP, qu'il a accusés de légèreté et d'amateurisme.

L'Union syndicale des magistrats (USM) a pour sa part appelé la classe politique à prendre ses responsabilités.

"Je ne peux pas m'empêcher de penser aujourd'hui à ce que les politiques auraient dit si c'étaient des magistrats qui avaient fait des boulettes de cet ordre", a dit Christophe Régnard, le président de l'USM, syndicat majoritaire dans la profession, sur France Info.

"Ces personnes vont devoir être libérées et il y aura certainement des actions en responsabilité contre l'Etat, des dommages et intérêts puisque c'est une responsabilité du gouvernement en 2004", a-t-il ajouté.

Source Reuters - Marine Pennetier

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