Vidéos. Elle est belle l’extrême-droite ! On la redécouvre durant ce procès ; au lieu d’assumer une bagarre entre militants d’extrême-gauche et d’ extrême-droite les protagonistes se planquent, tout comme le fameux Batskin, leur leader, qui se camoufle derrière un médecin pour éviter de comparaître à la barre.

C’est la honte d’un groupuscule se voulant «nationaliste» et se planquant à la moindre baston ; et ces guignols veulent nous protéger alors qu’ils n’arrivent même pas à assumer eux-mêmes.

L’affaire Méric

Cinq ans après la mort de Clément Méric lors d'une bagarre en plein Paris, trois skinheads sont jugés depuis ce mardi devant la cour d'assises de Paris. Deux d'entre eux, Esteban Morillo et Samuel Dufour, poursuivis pour coups mortels, encourent jusqu'à 20 ans de réclusion criminelle.

Que s'est-il passé ce 5 juin 2013 lorsque, d'une bagarre entre militants d'extrême gauche et skinheads d'extrême droite en marge d'une vente privée de vêtements dans le quartier de Saint-Lazare, Clément Méric s'est effondré? Les enquêteurs ont bien relevé le paradoxe de ce procès : malgré cet affrontement public et des coups mortels dont l'auteur est connu, des questions difficiles restent à trancher quant aux responsabilités de chacun. Et des témoignages se contredisent.

Vendredi : l'usage d'un poing américain au coeur du procès

L'usage - ou non - d'un poing américain lors de la bagarre du 5 juin 2013 est au centre des débats à la Cour d'assises de Paris. C'est en effet l'une des questions clés du procès : deux des trois accusés - Esteban Morillo et Samuel Dufour - sont en effet jugés pour des coups mortels portés en réunion et avec arme, un crime pour lequel ils encourent jusqu'à vingt ans de prison. Quinze ans si l'usage d'arme est écarté.

Or, vendredi, un médecin a livré une contre-expertise, déclarant : "Clément Méric a été victime de plusieurs traumatismes directs, compatibles autant avec des poings nus qu'avec des bagues et un poing américain." Sur l'image du crâne tirée du scanner, projetée sur grand écran à l'audience, on voit très nettement une courbe noire tranchant avec le gris des os du nez : "C'est une fracture, incontestable. Le diagnostic est visible même par un non médecin", a affirmé le légiste.

Cette contre-expertise contredit pourtant le rapport d'autopsie du premier légiste, qui n'avait constaté "aucune fracture des os propres du nez" et écarté fermement l'utilisation d'un poing américain. Cette fois, il y a donc un doute, même si le médecin a indiqué que les lésions "d'une grande régularité, en ligne" sur la joue gauche de Clément Méric lui "évoque un objet contondant très dense". Un témoignage plus favorable donc à l'accusation. Le principal accusé, Esteban Morillo, avait lui reconnu avoir porté deux coups, à mains nues, à Clément Méric, dont le coup qui l'a fait s'écrouler sur la chaussée. Samuel Dufour avait des bagues mais affirme n'avoir jamais frappé Clément Méric.

Jeudi : le témoignage saisissant de la mère de Clément Méric

Jeudi, au troisième jour du procès, le témoignage de la mère de Clément Méric, Agnès, a saisi la Cour d'assises. Elle a décrit un enfant "curieux", un adolescent de "convictions", et un jeune homme qui s'est battu contre la maladie, atteint d'une leucémie. "Clément avait une forme d'élégance, à la fois dans sa posture physique, et aussi une élégance morale et intellectuelle", a-t-elle indiqué devant des photos de son fils projetées sur grand écran en souriant au souvenir de son fils anarchiste s'habillant en polo Fred Perry.

Face aux trois accusés, elle dit ne pas avoir le sentiment "d'une prise de conscience de la gravité de ce qui s'est passé". A la présidente qui demandait si elle souhaitait s'adresser à eux, elle a répondu : "Est-ce que eux, ils ont envie de nous dire quelque chose?" Elle raconte les avoir croisés, lors de la reconstitution des faits : "J'espérais, j'attendais. Je me disais, si on est des humains, on doit se sentir concerné par quelque chose de si important, qui nous lie."

Invité à se lever, Samuel Dufour, accusé avec Esteban Morillo d'avoir porté des coups mortels à son fils, a prévenu d'emblée : "Bon, je vais pas être à la hauteur." "Je suis désolé mais je n'ai pas touché votre fils", a-t-il dit. "C'est surtout pour lui. Il avait une vie", a répondu la mère avec douceur. "C'est dur pour ceux qui restent aussi", est-il parvenu à articuler, sans qu'on sache s'il parlait d'elle, de lui ou des deux. Puis Esteban Morillo s'est levé, très vite en larmes, répétant qu'il était "sincèrement désolé". "Vous croyez qu'il suffit d'être désolé?", lui a alors asséné la présidente de la cour. "Je ne sais pas quoi dire. J'aurais voulu ne pas être là. Je regrette tout ce que j'ai pu faire", a-t-il ensuite reniflé.

Mercredi : sept secondes de bagarre et des zones d'ombre

Parmi les questions difficiles à trancher quant aux responsabilités de chacun : celle, centrale, du scénario de la rixe. Sept secondes d'affrontement, mais tout reste encore à établir : "Est-ce que cette rencontre était préméditée ou fortuite?", "Est-ce qu'il y a eu des éléments extérieurs qui ont envenimé les choses?", "Est-ce qu'il y a eu usage d'un poing américain?", a énuméré aux assises le commandant de la brigade criminelle chargé de l'enquête.

Les témoignages recueillis ont permis d'esquisser un scénario, mais avec des inconnues. Ce 5 juin 2013 en marge d'une vente privée, les deux groupes se toisent, s'invectivent. Clément Méric, arrivé un peu plus tard que les autres, est décrit par un agent de sécurité comme "fluet" mais "virulent". Un jeune antifasciste signale à un vigile la présence de poings américains dans le sac à dos d'un skinhead. Un agent demande aux anfifas de sortir. Puis un vigile demande aux skinheads de quitter les lieux par la droite, pour éviter toute rencontre. Ils partent à gauche. "Ils ont appelé des renforts - dont Morillo -, ils ont peur de se retrouver avec dix antifas en bas", a estimé à la barre le commandant.

Pour la police, du côté des skins, la décision est prise d'aller au contact. Du côté des antifas, les motivations ne sont pas claires : "Pourquoi rester si on a peur que les autres sortent des poings américains?" "Pour moi, ils se prémunissent, tous. Ils appellent tous des renforts, mais ceux des antifas ne sont pas arrivés", a affirmé l'officier. "Il y a une histoire de fierté : personne ne veut baisser la culotte", a-t-il résumé. La vidéo issue d'une caméra de la station de RER voisin est projetée à l'audience. Le cadrage, qui ne laisse voir que les jambes des protagonistes, "ne permet pas de dire qui a frappé en premier" ni s'il a été "fait usage d'une arme", constate un expert vidéo. 

Les témoins se contredisent alors. Plusieurs disent avoir vu Esteban Morillo enfiler un poing américain. D'autres décrivent Samuel Dufour comme assénant les coups mortels. D'autant que plus tard dans la soirée, ce dernier se vantera dans un SMS d'avoir utilisé "un poing américain" et "défoncé" les antifas. Mais aucune arme n'a été retrouvée.

Mardi et mercredi : les premières explications des accusés

A la barre mercredi, l'ex-skinhead Samuel Dufour a fait part de son sentiment d'injustice après un an de détention provisoire et alors qu'il répète n'avoir "jamais frappé" le militant antifasciste. Le jeune homme aujourd'hui âgé de 25 ans, qui s'était lui-même "rendu à la police" pour donner sa version des faits avant d'être incarcéré, assume son "nationalisme" et même l'achat d'un poing américain - "plus pour se défendre". Il raconte aussi que ses blagues sur "les nègres" ou "les PD" lui ont parfois valu des ennuis dans son travail d'apprenti boulanger. Un humour que "vous ne pouvez pas comprendre", a-t-il dit à la présidente.

Désormais boulanger à Rouen, il a également rappelé avoir "interdiction" de voir ses copains du Local, le bar de Serge Ayoub, l'ex-chef des skinheads parisiens d'extrême droite. Il dit avoir refait sa vie, mais explique ne pas avoir assez d'argent pour faire enlever ses tatouages. A-t-il pris du recul depuis cette époque, lui a-t-on demandé? "J'ai vécu ça comme une injustice. J'étais surtout en colère", a-t-il seulement éludé.

La veille, c'est l'autre principal accusé qui ouvrait le procès. Esteban Morillo, lui aussi maintenant âgé de 25 ans, a raconté avoir de son côté quitté cette extrême droite "de gros bourrins" qui ne lui a apporté "que des problèmes". Incapable d'expliquer ses sympathies d'ultradroite - qui remonteraient à ses 17 ans, alors qu'il se formait au métier de boulanger - il dit qu'il rendait des services, venait à des manifestations "pour faire nombre", participait à des rassemblements contre les violences aux animaux. "J'ai fait quelques temps à Troisième voie, c'était un syndicat, ni de droite, ni de gauche, avec une conviction solidariste", a-t-il dit. "Ce qui veut dire?" a alors demandé la présidente. "A vrai dire, je sais pas", lui a répondu Esteban Morillo.

Dans son costume sombre, il a dit à quel point il est "attristé par cette affaire". Il a pris près de 40 kg en cinq ans, vient de perdre son dernier emploi, dans une société de nettoyage, "comme à chaque fois" qu'on parle de l'affaire, a-t-il raconté. Mais les avocats de la famille Méric ne sont pas montrés convaincus. "Vous dites que vous avez changé, mais j'ai l'impression que vous avez gommé, simplement", a asséné Me Christian Saint-Palais.

Les deux seront de nouveau interrogés en début de semaine prochaine. Le verdict est quant à lui attendu le 14 septembre.

Procès Méric : quand les lâches n’assument pas
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